IX Quelques Témoignages Dina Bélanger à sur le Séjour de Bellevue

J ‘ai prié, et la prudence m’a été donnée ; J’ai invoqué, et l’esprit de sagesse est venu en moi. Je l’ai préférée aux sceptres et aux couronnes, Et j’ai estimé de nul prix les richesses auprès d’elle. (Sagesse, vii, 7-8.)

Témoignage de M. l’abbé Gelly, aumônier de Bellevue.

167.   Il y a vingt ans, lors du séjour de Dina Bélanger à Bellevue, j’étais aumônier externe; j’allais chaque matin au couvent pour les offices et je retournais ensuite en ville où je prenais pension; je n’avais donc avec les élèves d’alors que des rapports très éloignés; c’est pourquoi mes souvenirs particuliers sont peu nombreux.

168.   Je rencontrais cette bonne enfant au confessionnal tous les quinze jours, à la sainte table, tous les matins, et à la lecture des notes, une fois le mois.

169.   Comme elle était d’un caractère timide, d’une grande simplicité et d’une profonde humilité, elle ne faisait rien pour attirer les regards. Dans le temps, je ne l’ai pas remarquée d’une manière particulière, car, parmi les élèves de cet âge, dans nos couvents, il y en a tant qui sont admirables par leur piété et leur candeur.

170.   Cependant, je me rappelle bien qu’elle faisait la sainte communion tous les matins, et avec une piété vraiment angélique.

171.   A la lecture des notes, chaque mois, jamais la moindre remarque sur sa conduite et son travail. A cette occasion, c’était la coutume à Bellevue de dire en public la raison pour laquelle une élève avait perdu des points ou mérité des mauvaises notes au pensionnat ou en classe. Jamais rien de répréhensible sur le compte de Dina.

172.   Comme elle avait un talent facile, elle était presque toujours première en classe et en musique. Ses succès la laissaient toujours humble, bonne, aimable et sans aucune prétention. Conduite exemplaire en tout et modèle parfait: voilà Dina telle que je l’ai connue autrefois.

Témoignage de Sœur Sainte-Marie-Germaine, C. N. D.

173.   Élève très bien douée, d’une piété solide, d’une conduite irréprochable, elle était en même temps d’une réserve, d’une timidité telles que nul ne pouvait soupçonner les grâces et les lumières dont sa jeune âme était déjà inondée…

Témoignage de Sœur Sainte-Adolphine, C. N. D.

174.   J’ai connu et admiré Mlle Dina Bélanger au couvent de Bellevue. C’était une jeune fille modèle, simple, délicate, pieuse, intelligente, et très appliquée à ses études couronnées du plus heureux succès. Elle n’a pas été mon élève; j’ai eu peu de rapports avec elle, mais je sais que ses maîtresses et ses compagnes l’estimaient beaucoup.

Témoignage de Sœur Sainte-Marie-Lætitia, C. N. D. (suite).

175.   …Avec cela, sa dignité de manières, sa politesse exquise, sa déférence pour les religieuses, son amabilité, inspiraient le respect. Aussi avait-elle non seulement la confiance de ses maîtresses, mais celle de ses compagnes et jouissait en même temps de leur amitié.

176.   Timide, réservée, sensible, elle parlait peu, écoutait beaucoup, savait toutefois dire son mot à propos et se prêter pour rendre service.

177.   A mon humble avis, Dina Bélanger fut une élève parfaite que je ne dus reprendre en rien. Tout était, chez elle, marqué au coin de la sagesse, du bon sens, de la discrétion, du désir de la perfection, conséquence de la belle et bonne éducation reçue auprès de ses vertueux parents, tous deux si excellents chrétiens.

178.   Plus tard, j’ai revu Mlle Bélanger qui, après ses années au pensionnat de Bellevue, revenait à sa modeste académie voir ses anciennes maîtresses; elle nous témoigna toujours les plus délicats sentiments.

179.   Après ses études’ musicales poursuivies à New-York, assez souvent, j’ai eu l’occasion d’admirer sa belle simplicité, sa modestie, sa bienveillance. Pour faire plaisir à ses anciennes maîtresses, elle venait avec sa compagne, Mlle Bernadette Létourneau, aujourd’hui Mère Saint-Omer de Luxeuil, religieuse de Jésus-Marie au couvent de Sillery, exécuter ses plus belles pièces de musique. Quel plaisir esthétique nous goûtions à l’entendre!

180.   Tout était charmant en elle, parce que tout était pur et tendait à monter vers les sublimes sommets.

181.   Voilà quelques traits de la physionomie morale de la gracieuse fillette à qui j’ai eu le bonheur de communiquer quelques notions du savoir humain. J’ai touché une âme sainte… Je le pressentais, mais j’ignorais alors qu’un si grand sens surnaturel animait déjà toutes ses actions.

Témoignage de Sœur Saint-X…, C. N. D. (1)

182.   J’ai eu Dina Bélanger pour élève du mois de septembre 1912 à la fin de juin 1913; elle faisait son cours gradué à notre pensionnat de Bellevue, Chenrin Sainte-Foy, Québec.

(1) Pour déférer au désir exprimé par cette religieuse, nous ne la nommons pas.

183.   C’était une jeune fille de quinze ans, grande, intelligente, gracieuse, aimable et si parfaite!… Rien de guindé ni d’étudié dans ses manières; aucune singularité dans sa conduite. On la trouvait toujours fidèle à tous les points du règlement des pensionnaires. Ses actes comme sa tenue et ses devoirs de classe étaient marqués au coin d’une perfection irréprochable. Dans ses compositions sur n’importe quel sujet, il ne manquait ni point, ni virgule, ni accent. Ordinairement, il fallait inscrire le maximum des points alloués. Ses cahiers d’arithmétique, en particulier, constituent une merveille. A dessein j’emploie le verbe au présent, car elle-même, la chère enfant, m’ayant dit un jour que sa mère conservait tous ses petits travaux d’écolière, je suis certaine qu’il vous serait possible de les voir et d’en juger par vous-même, si vous le désirez. Il importe de savoir que ces cahiers contiennent des problèmes faits rapidement, comme exercices de tous les jours.

184.   Contrairement aux autres élèves, Dina n’avait aucune amie particulière parmi ses compagnes ou ses maîtresses. Elle paraissait les aimer toutes également, et toutes le lui rendaient à plein cœur. Je ne me rappelle pas avoir entendu une seule réflexion désagréable sur son compte.

185.   Il va sans dire qu’il n’était jamais question de la réprimander. Cependant, comme il fallait la préparer pour les luttes de la vie, je tâchais de profiter des moindres occasions pour sonder cette âme qui me paraissait une énigme à cause de sa grande perfection.

186.   Figurez-vous, mon révérend Père, une jeune fille de quinze ans, qui, au cours d’une année de pensionnat, ne laisse jamais paraître un signe d’impatience ou de moins bonne humeur, n’a jamais non plus de ces accès de joie habituels à la plupart des écolières, ni de ces saillies légères qui, après tout, ne déplaisent pas toujours à cet âge.

187.   Cette complète possession de soi, cet empire absolu sur toutes ses impressions, voilà ce qui m’intriguait dans cette chère enfant. Sous les petits coups de contradiction par lesquels je trouvai moyen de l’exercer une fois ou deux, la chère âme n’a rendu que des sons de vertu. Dans l’ignorance totale de sa vie intérieure intense, de son intime union avec Dieu, j’attribuais cette conduite admirable à l’excellente éducation reçue dans sa famille et à son caractère plutôt timide et réservé.

188.   …Un jour, Mgr Bruchési, venu à Québec pour une réunion du Conseil de l’Instruction publique, ayant annoncé sa visite à Bellevue, je préparai une petite adresse de bienvenue et j’appelai ma Dina, qui était toujours prête à faire les honneurs du pensionnat. Je m’étais sans doute mal expliquée, car, malgré sa parfaite bonne volonté, ma grande fille n’avait pas écrit l’adresse en question au moment où la cloche avertit les élèves de se réunir à la salle de réception. J’étais loin d’être contente et je ne le cachai pas… Sans s’émouvoir, Dina s’appuie sur la table la plus proche, écrit rapidement sa page et, en même temps que Mgr, par une autre porte, elle entre et s’acquitte de sa tâche honorable avec un calme et une grâce dont je fus étonnée après la petite scène qui venait d’avoir lieu.

189.   Au cours de l’année scolaire, Dina Bélanger fut prise de la grippe. La maîtresse de santé lui prodigua ses soins, mais le mal semblait vouloir durer ; alors, il fut proposé à Mme Bélanger d’emmener sa fille chez elle pour la guérir plus rapidement. Quand Dina apprit qu’il fallait partir: “Et mon assiduité? fit-elle, je vais perdre ma première place…” “Il n’est pas nécessaire que tu sois toujours première, reprend la mère, une autre aussi sera contente d’être première à son tour.” Sans rien répliquer, Dina se prépare et s’en va. A son retour, elle dut en effet se mettre au dernier rang de sa division, tout en continuant de mériter les plus hautes notes de sa classe et sans faire paraître la moindre contrariété.

190.   Une autre fois que les élèves de la première classe avaient critiqué les compositions de la deuxième classe, Dina fut chargée de mettre au point tous ces devoirs. Au cours d’une séance littéraire où lecture fut faite des compositions et des critiques, elle dut critiquer en dernier ressort. Les remarques très justes, brèves et un peu malicieuses qu’elle fit d’un air parfaitement aimable et si gracieux, amusèrent fort toute l’assistance.

Témoignage de Sœur Sainte-Julie, C. N. D.

191.   Vingt années ont passé depuis mes relations avec cette chère Mère Sainte-Cécile de Rome, et ma mémoire est plutôt médiocre.

192.   Pendant ses deux années de pensionnat, Mlle Bélanger a été une écolière accomplie et le modèle de ma division. Pour ma part, je ne la rencontrais qu’aux heures de musique. Une demi-heure, deux fois la semaine, nous rapprochait pour la leçon de piano, et c’était si court qu’il ne restait aucun moment pour une petite confidence. Cette jeune fille à la physionomie souriante et si bienveillante était peu expansive; elle paraissait gênée, timide; il nous fallait prendre l’initiative.

193.   En récréation, elle avait un livre ou un tricot; les jeux, pour Dina, n’avaient aucun attrait; le bruit la fatiguait.

194.   C’est Mme Bélanger, sa mère, qui me tenait au courant des dispositions de sa petite bien-aimée.

195.   Après sa sortie du couvent, elle est venue me voir quelquefois, élégante, mise avec goût, jolie et aimable. Nous causions de choses indifférentes, mais surtout de musique; elle avait alors, me disait elle, de grandes ambitions; même le prix d’Europe miroitait à l’horizon. Aujourd’hui, je comprends bien autre chose; cette prétendue ambition était factice: déjà l’amour du bon Dieu était son unique objectif. Depuis longtemps, Mlle Bélanger pouvait dire: “Ma vie a son secret, mon âme a son mystère”, lequel a été bien gardé.

Témoignage de Mlle Béatrice Kirouack.

196.   Mlle Bélanger personnifiait le devoir et occupait les premières places. Nous, nous ne cherchions qu’à nous amuser et restions à l’arrière-plan. Notre esprit si léger demeurait indifférent aux qualités de cette jeune fille que tout le monde aimait… Cette chère Dina possédait l’énergie de volonté qui caractérise les saints.

Témoignage de Mlle Martha-S. Nessanger.

197.   J’aimais particulièrement Dina; compagnes de classe, nous avons vécu de belles heures au cher vieux Bellevue. J’admirais la douceur de caractère, la distinction de mon amie. Parmi les élèves, on l’estimait hautement…

Témoignage de Mlle Marie-Marguerite Laberge.

198.   Que vous dire à son sujet? Les grandes admirations sont muettes… et, quand on a eu comme moi le privilège de vivre en relation intime avec une telle sainte, on se sent incapable d’exprimer ce que l’on éprouve à son endroit… Jamais, à ma connaissance, plie n’a prononcé un mot contre la charité.

199.   Ma bonne amie était mon ange conducteur… Avec mon tempérament, seule une sainte pouvait ne pas s’impatienter. Que de sollicitude et d’indulgence de sa part, à mon endroit! Et que d’efforts il lui fallait faire (cela, je l’ai remarqué maintes fois) pour ne pas répondre à mes taquineries. Douée d’une grande vertu, elle savait se renoncer en revenant à moi la première, alors que j’étais la seule coupable. Ainsi, lorsque je boudais, Dina venait à moi avec son beau sourire et nous faisions la paix. Pour me bien prouver qu’elle me pardonnait mes sottises, elle me donnait une image et je prenais la résolution de ne plus la chagriner.

200.   J’ai remarqué aussi sa promptitude à obéir au moindre désir exprimé par sa bonne mère. Je trouvais parfois que Mme Bélanger était trop sévère pour sa fille, car, malgré toutes les sottises que je lui faisais, j’aimais de tout cœur ma chère Dina.

201.   Je me souviens d’un après-midi où j’étais sortie avec elle. Il faisait ce jour-là une chaleur torride. Nous revenions, Dina et moi, bien fatiguées. En rentrant, nos deux mères nous reçurent à bras ouverts. Heureuses de nous revoir chez nous, nous enlevâmes nos chapeaux avec l’intention bien arrêtée de nous reposer. Mais à peine avions-nous déposé sur la table des fleurs champêtres que nous rapportions, que Mme Bélanger demande à sa fille d’aller à un mille de chez nous chercher une chopine de crème. Un “oui maman ”, accompagné de son plus beau sourire, fut toute la réponse de la chère enfant; et moi, tout bas, je rageais, sachant Dina exténuée de fatigue…

202.   Dina vivait aussi dans une sainte indifférence. Je ne l’ai jamais entendue exprimer le désir de s’habiller à son goût; elle s’en remettait toujours aux décisions de sa mère. Et, je le devinais, leurs goûts étaient parfois bien différents. Dina se soumettait joyeusement.

203.   A table, c’était encore le même procédé : point de goût particulier ; tout était également bon pour elle. J’en étais bien étonnée, me trouvant moi-même si loin de la voie où elle courait déjà.

204.   Le jour de son entrée à Sillery, elle m’a reçue intimement, et là, elle m’a révélé avec un accent vraiment maternel des travers et des habitudes qui me retenaient loin du devoir. Je fus très humiliée de la savoir au courant de mes secrets de conscience, et, malgré tout, je sentis le besoin subit de lui avouer toutes mes faiblesses.

205.   Après avoir entendu ma “confession”, elle me dit en souriant avec tristesse: “Je savais cela. Ne vous découragez pas. Obéissez aveuglément à votre directeur. Il veut votre bien. Je vais prier pour tous au couvent. Et je pourrai vous aider là-bas mieux qu’ici.”

206.   Comme je pleurais, elle ajouta en souriant: “Mais vous m’aimez et vous pleurez mon bonheur?” Elle me consola de son mieux. Et lorsque nous nous quittâmes, elle était rayonnante, et moi, j’étais consolée. Je ne l’ai plus revue.

Témoignage de Aime Camille Lessard (suite).

207.   A chaque visite à l’Alma Mater, j’entends des louanges faites par les maîtresses de cette parfaite élève.

208.   Dans le monde, je ne rencontrais pas souvent Dina; d’ailleurs, elle ne semblait pas chez elle au milieu du bruit. Je la voyais plus souvent sur le chemin de l’église. Pendant la messe surtout, elle en imposait par son attitude toujours recueillie.

209.   “Celui qui ne pèche pas par la langue est un homme parfait.” Je n’ai souvenir d’aucune parole malveillante de Dina. Toujours indulgente et bonne dans ses jugements, elle manifestait donc une grande bonté de cœur.

210.   Les succès dus à son talent musical ne semblaient pas l’atteindre: je la trouvais apathique; elle ne vivait peut-être que d’humilité.

Témoignage de Aille Clara Bédard (suite).

211.   A seize ans, le langage, la conversation de Dina, permettaient d’entrevoir qu’elle deviendrait une femme supérieure. Jamais une parole pour faire de la peine; elle craignait toujours de blesser. Elle cachait son savoir avec des gens moins instruits.

212.   Le matin, son père partait vers huit heures; elle n’allait pas le reconduire aux chars comme le faisaient les jeunes filles de son âge. A son retour, elle l’embrassait simplement.

213.   Le soir, quand la conversation languissait, nous faisions une partie de cartes et elle y mettait beaucoup d’entrain. Une fois, en jouant avec son père, celui-ci lui fit un reproche; mais il s’aperçut ensuite de son erreur. Dina avait amèrement senti l’observation. Je l’avais constaté par le douloureux soupir qu’elle avait exhalé sans proférer une parole.

214.   Elle aimait tant la musique que les plus grandes chaleurs de l’été ne pouvaient l’empêcher d’étudier. Nous allions au couvent, car il n’y avait pas de piano à la maison. Elle avait soin de m’enfermer à la chapelle, avec défense d’en sortir. Étant sur le même étage, je pouvais écouter à mon aise ses beaux exercices.

215.   Ses études terminées, Dina passait par la chapelle, faisait une course au jardin, revenait par la cuisine pour taquiner la servante, mais si délicatement ! Un échange de bons mots avec les religieuses en vacances, et nous reprenions le chemin de la maison…

216.   Quand il s’agissait de défendre les intérêts de M. Bélanger, la gêne de Dina tombait: elle s’exprimait avec fermeté et précision…

217.   Si, à table, quelque chose ne pouvait se partager, il n’y avait aucun moyen de le lui faire accepter.

218.   Le soir de sa mort, dans un rêve, je la vis avec trois autres vierges.

Témoignage de Mlle Marie-Blanche Matte.

219.   Il faudrait une autre plume que la mienne pour faire connaître le charme des vertus qui émanaient de Dina lors de nos trop courtes rencontres. Néanmoins, je veux essayer de dire à ma manière ce que fut Dina dans ses rapports avec ma famille.

220.   De toutes mes cousines, — et elles étaient nombreuses, — pas une n’égalait celle-ci pour être modeste en tout, partout et toujours. Avec mes frères, elle était d’une réserve absolue, sans rien perdre pour cela de sa belle humeur. Elle était bien, bien joyeuse.

221.   Jamais, à ma connaissance, elle n’a dit la plus petite trivialité; pourtant, c’est chose bien commune dans Je monde. J’ai remarqué bien des fois combien elle imposait le respect. Quand Dina arrivait au milieu d’un groupe de cousins et de cousines, les conversations devenaient plus sérieuses, plus charitables. Elle était spirituelle, et n’hésitait pas à détourner la conversation si le prochain était attaqué.

222.   Je la trouvais très obéissante: elle obéissait promptement. Un jour, nous étions trois cousines au jardin, à manger des fruits. Sa mère, craignant qu’elle ne se rendît malade, lui dit qu’elle en avait assez mangé; la phrase n’était pas finie quelle était déjà hors du jardin et répondait: “Oui, maman!” Je restai surprise, car je pensais que cette obéissance n’existait qu’au couvent.

223.   J’ai toujours remarqué qu’elle priait mieux que les autres. Jamais, dans l’église, sauf une fois, je n’ai vu Dina parler ou rire, ce qui se fait fréquemment.

224.   Avec tout le monde, elle était très aimable, empressée et toujours joyeuse. Une seule fois, j’ai vu ma cousine changer d’humeur, et cela fut très court; elle ne dit aucune parole blessante; quelques petits mots piquants et ce fut tout.

225.   Elle recherchait toujours la moindre place et ce qu’il y avait de moins bon. Elle faisait toutes ses actions avec une grande simplicité, s’étudiant à passer inaperçue.

226.   Je la crois bien sainte et j’ai bien confiance en elle.

Témoignage de Mme J.-Yves Dionne, née Jeanne Jobin.

227.   J’ai connu Dina vers l’âge de sept ans. J’ai été très liée avec elle jusqu’à son entrée en religion, et je puis vous dire que jamais, au cours de cette longue amitié, je n’ai reçu d’elle un seul exemple moins vertueux. J’ai toujours été entraînée au bien par sa conduite et ses bonnes paroles. Je la voyais assidûment durant les sept années que nous suivions les mêmes classes, chez les religieuses de la Congrégation de Notre-Dame, à Saint-Roch d’abord et ensuite à Jacques-Cartier; j’allais fréquemment faire mes devoirs avec elle dans sa famille; quelquefois, elle venait chez nous. Je ne l’ai jamais prise en défaut; jamais elle ne perdait son temps; jamais elle ne parlait mal de son prochain. Elle était très studieuse, très bonne, très douce, cherchant toujours à excuser les torts de ses compagnes; très modeste, ne tirant jamais vanité de ses succès scolaires. Somme toute, c’était une élève modèle en qui on ne voyait pas de défaut.

228.   Voici un petit fait qui montre bien son esprit de sacrifice. Dina devait aimer les bonbons, comme les autres enfants de son âge, et pourtant, quand Mme Bélanger en mettait de beaux plateaux à notre disposition, Dina en prenait un, sur les instances de sa mère et pour lui faire plaisir, et n’y retournait pas.

229.   Quand elle était pensionnaire à Bellevue et que j’allais la voir, quand plus tard j’allais lui rendre visite chez sa mère, rue du Roi, ou à leur maison de campagne, à Beauport, toujours, je n’ai eu qu’à remercier Dieu d’avoir une aussi bonne amie, dont l’influence était si bienfaisante. Quand j’avais conversé quelques instants avec elle, je sortais de ces entretiens, encouragée, fortifiée dans la voie du bien, attirée vers le mieux.

230.   Après son entrée en religion, je l’ai vue rarement, mais chaque fois que j’ai eu le privilège de la visiter, j’ai eu l’impression de causer avec une sainte. Ce qui me frappait chez elle, c’était son esprit de foi, sa résignation a la volonté du bon Dieu. Un jour que je lui offrais de prier pour elle, elle me répondit à peu près en ces termes: “Ne demande pas ma guérison; je suis heureuse de faire la volonté du bon Dieu.”

231.   Je la revois encore, sur le haut du palier, me disant avec une expression de bonté quasi surnaturelle: “Je vais multiplier les Ave avec les milles qui nous séparent.”

Témoignage de Mlle Adrienne Drouin.

232.   Au couvent de Bellevue, à l’ouverture des classes, en septembre 1911, je fis la connaissance de Dina Bélanger. J’ai vécu deux années avec elle; je puis dire avec sincérité que Dina était une élève exemplaire, toujours fidèle au règlement, aimable et complaisante pour toutes ses compagnes. Brillante en classe, ses succès étaient tels qu’elle arrivait presque toujours première.

Témoignage de Mlles Allain.

233.   Nous avons connu Dina à Bellevue. Élève exemplaire, humble, remarquable par sa constante application et sa piété angélique.

234.   Très minutieuse, elle apportait un soin extrême à ses études musicales, à ses classes, à ses ouvrages d’art; toujours la même ardeur, le même enthousiasme et le même empressement à quitter le travail quand la cloche appelait à un autre emploi: c’était une élève modèle, toujours fidèle au devoir.

235.   Sans manifester aucune préférence, elle se montrait également aimable pour toutes ses compagnes.

236.   Peu expansive, délicate, toujours un peu distante. L’expression craintive de ses beaux yeux nous l’avait fait appeler, pour la taquiner, “notre petite gazelle”, ce qui l’amusait.

Témoignage de Mme J.-M. Dagneau, née Marguerite Fortier.

237.   J’ai toujours éprouvé pour Dina une amitié mêlée d’admiration. J’ai passé mon enfance et ma jeunesse avec elle; plus que d’autres, j’ai pu constater sa perfection en tout. Jusqu’à 1 âge de sept à huit ans, nous étions voisines. Nous nous amusions bien souvent ensemble.

238.   Je me rappelle qu’un jour, étant allée la voir, je la trouvai jouant avec des petites poules mécaniques qui mangeaient dans un tas de sable. Voyant l’intérêt que je prenais à ce jouet, elle voulut absolument me le donner, geste qui montre combien elle savait déjà se renoncer pour faire plaisir. Elle quitta mon voisinage et je ne la vis plus que rarement, jusqu’à ce qu’elle vînt pensionnaire avec moi, à Bellevue.

239.   Au pensionnat, elle fut, — toutes se plaisent à le dire, — une élève sage, gaie pendant les récréations, docile et obéissante. Elle était le modèle de ses compagnes. Assidue au travail, elle le faisait avec perfection. Toujours favorisée par le succès, elle n’en tirait pas vanité. Il me semble qu’elle priait mieux que nous; elle avait toujours une bonne parole pour élever l’âme. Les élèves la disaient sainte; pour la taquiner, on la surnommait: la “divine” Dina.

240.   Mais quand elle refusait de se mêler à nos espiègleries, – ce qui se répétait chaque fois que l’une ou l’autre proposait de jouer un bon tour, – nous n’hésitions pas á la qualifier de “simple”. Je sais maintenant pourquoi nous ne pouvions pas la comprendre : elle était déjà si loin de nous.

241.   Voilà mes quelques souvenirs sur Dina: aucun fait extraordinaire, si ce n’est l’impression laissée par sa vie toujours orientée vers le bon Dieu, vers le désir de lui plaire.